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La lecture des textes imprimés de la Renaissance n'est pas toujours aisée, à cause de nombreuses conventions typographiques qui sont différentes de celles auxquelles nous sommes habitués. Les polices de caractères sont parfois déroutantes et les conventions ne sont pas appliquées de manière uniforme : on peut constater des variations au sein d'une même phrase. La première chose à faire est d'aborder la transcription avec patience, et de ne pas chercher à lire trop vite. Avec un peu d'entraînement, on arrive à transcrire facilement la plupart des titres des imprimés.

petite nef
Un exemple de texte qui combine plusieurs difficultés : caractères gothiques, coupures des mots en fin de ligne non indiquées, abréviations.

Les caractères gothiques

Les caractères gothiques, fréquents dans les incunables, ont perduré longtemps dans le monde germanique. Ils sont donc relativement courants dans les productions de l'humanisme rhénan, ainsi que dans les textes religieux. Cependant, ils ont laissé le pas aux caractères romains au cours du XVIe siècle, de lecture plus facile pour nous.

Les minuscules gothiques peuvent généralement être lues directement sans trop de problèmes, mais les majuscules ont des formes spécifiques, comme le N de Nauicula ci-dessus.

Le f et le s

Un aspect déroutant de prime abord est l'utilisation d'une graphie du s très similaire à celle du f. Si l'on observe bien l'exemple ci-dessous, on peut voir néanmoins que le f comporte une barre horizontale médiane propre.

non solum
non solum Praefatio

Mais tous les s ne sont pas écrits avec cette graphie. Dans l'exemple ci-dessous, on peut voir dans le même mot Caesaris deux graphies différentes, le s en fin de mot ressemblant à notre s en script.

caesaris 1
Deux s distincts dans Caesaris

Les abréviations

De nombreuses terminaisons courantes de mots sont notées par des abréviations particulières, qui ne sont cependant pas systématiquement utilisées. Cette possibilité d'abréger ou non les mots permet en effet au compositeur d'ajuster le texte qu'il compose à la place qu'il lui reste sur les pages qu'il est en train de mettre en forme.

Il est courant que les terminaisons en -um soient notées par un ū (surmonté d'un tilde), comme literarum dans l'exemple ci-dessous. Ce tilde peut aussi servir à noter un -m, ou même un -n à l'intérieur d'un mot. Voir ici : prestantissimi.

exple ecrit
Exemple de l'utilisation d'un tilde pour un -n ou un -m à l'intérieur d'un mot et en finale : prestantissimi et literarum.

La terminaison entière -rum peut aussi être remplacée par un signe particulier, comme le montre sacrarum dans l'exemple ci-dessus, mais il s'agit d'un usage moins courant que le tilde.

Dans la terminaison en -ii, courante en latin, le double i est souvent noté ij.

ludus
Exemple de formes spécifiques au double i, suivis ou non d'un -s ; on voit aussi un tilde pour noter le -m de cum et diverses graphies du s.

La terminaison -ae est parfois notée par un e avec une cédille, comme dans l'exemple ci-dessous.

natura
Une graphie particulière pour -ae ; on peut aussi noter un double m noté par un simple m surmonté d'un tilde : summa.

La ponctuation

Elle est souvent déroutante pour nous. En particulier les deux points sont d'un usage très fréquent. Or ils n'ont presque jamais la valeur explicative des deux points du français moderne. Il s'agit d'une pause plus ou moins importante ou d'une manière de différencier différentes unités sémantiques. Ils peuvent assez souvent avoir le point-virgule ou la virgule comme équivalents modernes.

Par Laurent Gauthier
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