
Chapitre 1
Introduction
Dans cette page, des activités de lecture, d'analyse grammaticale et même une première approche de la traduction vous sont proposées à partir d'un recueil néo-latin de fables, les Fabulæ centum.
L'Italien Gabriele Faerno (1510-1561) a écrit ces fables en s'inspirant de divers recueils de fables antiques, notamment les fables transmises sous le nom d'Ésope. Des recueils plus récents font aussi partie de ses sources. Son travail consiste en particulier à mettre en vers les fables ésopiques écrites en prose. Faerno travaillait sur la comédie latine antique en parallèle (Plaute, Térence), et son style intègre souvent du vocabulaire et des mètres relevant de ces auteurs comiques.
Cet ouvrage a été publié après la mort de Faerno à Rome en 1563, dans le milieu humaniste patronné par le pape Pie IV. Il intéressait le milieu pontifical à la fois comme réécriture de la fable antique et comme ouvrage à vocation pédagogique, susceptible de contribuer à former les jeunes gens moralement, dans le contexte plus large de la Contre-Réforme. Nous vous donnerons à voir ici la deuxième édition, qui date de 1564. Le texte est le même que celui de la première édition.
Le recueil que nous allons découvrir est donc l'un de ces nombreux « maillons » qui jalonnent la vie des fables, depuis l'Antiquité jusqu'à La Fontaine, un siècle après Faerno. La Fontaine connaît ce recueil et s'en est même inspiré pour certaines fables.
I/ Découvrons les fables néo-latines
Pour commencer, voici la belle page de titre de l'édition parue à Rome en 1564.
Fabulæ centum, ex antiquis auctoribus delectæ et a Gabriele Faerno Cremonensi carminibus explicatæ, Rome, Vincenzo Luchino [impression réalisée en réalité par Paul Manuce], 1564. ©BnF YC-2211
À l'aide des indications portées sur l'image légendée ci-dessus, voire du Gaffiot en ligne, traduisez désormais le titre. Vous pouvez vérifier ici en regardant la solution.
II/ L'exemple d'une fable de Gabriele Faerno
Chaque fable est illustrée par une très belle gravure, réalisée selon la technique de l'eau-forte, qui permet une grande finesse dans les détails. Ces gravures ont été voulues par Faerno lui-même. Elles sont dues à un grand artiste napolitain, Pirro Ligorio (1512-1583), passionné par les recherches antiquaires (qui concernent les vestiges matériels de l'Antiquité). Elles marquent un tournant dans la tradition de l'illustration des fables : au lieu d'avoir un caractère universel, elles s'inspirent précisément de l'iconographie antique que l'on redécouvre alors. Vases, bas-reliefs, monnaies antiques sont en effet à l'arrière-plan de certaines illustrations.
Prenons l'exemple de la première fable, intitulée Ollae duae, aenea, et fictilis.
1. La gravure
Estampe illustrant la fable Ollae duae, aenea et fictilis, Rome, Vincenzo Luchino, 1564. ©Gallica
1) Regardez la gravure. Essayez de décrire les différents éléments qui la composent.
2) Lisez le titre et le lexique latin qui légende la gravure. Essayez de traduire le titre. Connaissez-vous une fable de La Fontaine qui s'en rapproche ? Sinon, allez voir la fable 2 du livre V des Fables de La Fontaine : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k65140109/f108.item.r=fables%20la%20fontaine
Lire ici la solution.
3) Quels éléments de la gravure vous paraissent antiquisants ?
Lire ici la solution.
2. Le texte de la fable
OLLÆ DVÆ, ÆNEA, ET FICTILIS
Duas trahebat amnis ollas, aeneam
Vnam, alteram autem fictilem.
Sed ahena, proprio praegrauata pondere,
Sibique porro praecauens,
Suadere coepit anteeunti fictili,
Coniungi uti uellet sibi,
Quo rapidum aquarum sustinerent impetum
Iunctis utrinque uiribus.
Cui fictilis, tua mihi, ait, uicinitas
Non admodum placet, soror.
Nam siue te mihi unda, siue me tibi
Prope adnatantem illiserit,
Vt sospitem te dura praestabit cutis,
Fragilem meam sic conteret.
Potentiorum semper est uicinitas
Vitanda tenuioribus.
Un fleuve charriait deux marmites, l’une
en cuivre, et l’autre en terre.
Mais celle en cuivre, alourdie par son propre poids,
et veillant au-delà à son propre intérêt,
Entreprit de persuader la marmite de terre, qui allait devant,
de bien vouloir être unie à elle,
Pour qu’ils supportent le courant rapide des eaux,
de leurs forces unies de part et d’autre.
Or la marmite de terre lui dit : « Ta proximité
ne me plaît pas du tout, ma sœur.
Car soit que l’eau t’ait fait me heurter, soit qu’elle m’ait fait à toi
me heurter, nageant à tes côtés,
Cette peau solide te gardera sain et sauf,
Autant qu’elle effritera la mienne, fragile.
La proximité des puissants est toujours à éviter pour les faibles.
1) Lisez la fable en latin à haute voix. Pour information, il s'agit d'une fable écrite avec deux types de vers différents : trimètres et dimètres iambiques.
2) Analysez ci-dessous A/ la fonction des mots ou groupes de mots français ci-dessous, B/ le cas et le nombre (sg. ou pl.) des termes latins correspondants.
- deux marmites / duas ollas ;
- l'une en cuivre, l'autre en terre / aeneam unam, alteram fictilem ;
- le courant rapide / rapidum impetum ;
- des eaux / aquarum ;
- la proximité / uicinitas ;
- des puissants / potentiorum ;
- ma sœur / soror.
Lire ici la solution : https://imago.langues-anciennes.be/wp-content/uploads/2022/06/Correction_exercice_chapitre_1.pdf
3) Lisez la fable de La Fontaine.

A/ Quels vers de La Fontaine sont très proches de ceux de Faerno ? B/ Quel élément, qui joue un rôle important à la fois dans le texte et sur la gravure du recueil de Faerno a disparu chez La Fontaine ?
Lire ici la solution.
III/ Parcourons plus largement le recueil de Gabriele Faerno
Feuilletez désormais l'ouvrage entier de Gabriele Faerno sur Gallica. Grâce aux gravures et à l'aide du Gaffiot, essayez de traduire les titres des quinze premières fables. Parmi elles, reconnaissez-vous des sujets traités par La Fontaine ?
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